18 Février 2016
Et si ç’avait été ma grand-mère ? Je l’avoue, c’est la première question que je me suis posé en découvrant l’article de Var Matin d'hier, concernant les mésaventures d’une nonagénaire seynoise et de sa famille aux urgences de La Seyne. Je me suis demandé comment j’aurais réagi si c’était un membre de ma famille qui avait été concerné.
Il se trouve qu’en tant qu’élu à la santé, je siège au conseil de surveillance de l’hôpital de Toulon-La-Seyne, le CHITS. Alors je « surveille ». Au même titre j’ai demandé à siéger au sein de la commission de relation avec les usagers (la CRUQ, qui traite les courriers de félicitations et de réclamations de ces derniers).
J’ai dès ce jour adressé un courrier au directeur du CHITS, afin qu’une enquête soit diligentée et pour obtenir des explications claires concernant cet incident. Var matin évoque une personne de 94 ans, stationnée dans l’entrée des urgences pendant plus de deux heures, dans les courants d’air, à coté des poubelles.
Les éléments de réponse font état de difficultés d’organisation liées aux vacances scolaires et à la survenue de l’épidémie de grippe hivernale. Deux phénomènes assez habituels et qui, je l’espère, devraient faire l’objet d’anticipation de la part des responsables des services de santé. Oui, en période de vacances on est aussi malade. Oui, l’hiver il y a la grippe.
Pourtant, voilà moins de deux semaines je me suis rendu à l’hôpital Georges Sand de La Seyne pour une visite de la structure en compagnie d’autres membres du conseil de surveillance qui y représentent les usagers et l’association des paralysés de France (APF). L’accueil par la responsable du site fut courtois et la visite complète et très enrichissante sur l’état de ce bel outil de santé. Nous avons visité différents services, la psychiatrie, les soins palliatifs et les urgences aussi. Nous avons constaté le dévouement des personnels de santé et pu admirer la présence d’outils performants comme le scanner. Alors comment expliquer de tels dysfonctionnements ?
Je ne m’en prendrai pas au personnel, ce serait trop facile, malhonnête et surtout injuste. D’abord parce que je sais que les agents du service public en général et de la fonction publique hospitalière en particulier, fournissent un important travail et font preuve de passion et de dévouement dans leur pratique professionnelle. Ensuite, parce que je commence à être un peu familier des politiques bureaucratiques de santé, celles notamment qui laissent l’hôpital faire face seul aux difficultés de la misère sanitaire et psychique de notre pays, celles qui justifient les fermetures, au nom de la rationalité, de la rentabilité, au nom de « l’efficacité » que l’on connaît. Le mois dernier, comme nous le craignions lors de la fermeture de la maternité et malgré l’ouverture du second tunnel de Toulon, une parturiente seynoise a accouché dans le tunnel, sans complications heureusement. J’en sais gré à nouveau aux pompiers seynois qui l’ont transportée et assistée.
Le personnel des urgences, comme c’est écrit à l’entrée du service, fait ce qu’il peut. Mais sa bonne volonté et son abnégation ne suffisent plus, depuis longtemps. À l’automne dernier, j’étais aux cotés des personnels lors de la venue de Patrick Pelloux à l’hôpital Sainte Musse alors que les urgentistes étaient en grève, parce que service saturé, parce que personnels à bout (dans un hôpital pourtant flambant neuf). À la même période j’intervenais en séance du comité de surveillance, alors que le rapport alarmant de la cour des comptes nous était présenté, je demandais à ce que l’on réalise un travail de prospective adapté aux préconisations de la CRC. Il pointe l’état très inquiétant des finances du CHITS pour les années à venir. L’avenir de l’activité même de l’hôpital n’est pas assuré à l’horizon 2020.
Nous, usagers et élus locaux à La Seyne n’acceptons ni la résignation ni l’immobilisme.
Nous n’acceptons pas cela : un hôpital Ste Musse aux urgences déjà saturées, un hôpital seynois dépouillé, une dette multipliée par cinq en moins de dix ans… Et une grand-mère aux urgences qu’on laisse attendre trop longtemps sans information et dans des conditions inacceptables.
Ça ne peut plus durer. Nous demandons aux responsables du CHITS de mettre en œuvre les moyens nécessaires à l’accueil des usagers des urgences de La Seyne à toute heure du jour et de la nuit. Nous leur demandons d’accélérer leur réflexion pour que rapidement et concrètement les locaux des urgences de l’hôpital Georges Sand fassent l’objet de travaux permettant au moins une attente digne des patients admis aux urgences. Une nonagénaire sans accompagnement, dans l’entrée, les courants d’air, à coté des poubelles ? Pas à La Seyne, ni à Toulon, ni ailleurs, pas dans la France de la République en 2016.